mercredi 25 juin 2014

Le rôle de la représentation cinématographique et la réception des oeuvres par le public


Introduction
                ° Qu'est-ce que la sociologie du cinéma ?
            Plutôt que de parler de la "sociologie du cinéma", il vaudrait mieux parler d'une sociologie du "cinéma et de ses publics". En effet, le cinéma n'existe que parce qu'il y a un public qui y oppose ou qui adhère aux représentations que le cinéma propose. Près de 95% des Français sont déjà allés au cinéma au moins une fois dans leur vie. Qui plus est, le cinéma est certainement le seul art dont tout le monde peut et ose émettre des jugements, que ce soient des jugements profanes ou savants.

                ° L'importance du cinéma dans une vie
           Chacun expérimente la salle de cinéma dès son plus jeune âge comme le fait remarquer Bertrand Mary avec les Walt Disney. C'est à cet âge qu'on apprend la "socialisation spectatorielle" (domestication du fauteuil, il faut retenir ses émotions et se concentrer pendant plus d'une heure).
           A l'adolescence, c'est là qu'on développe ses propres goûts en s'opposant à ses parents et qu'on veut avoir de nouvelles sensations (peur, suspense, passions sentimentale).

                ° A quoi s'intéresse la sociologie du cinéma ?
           Elément prépondérant de la culture des masses, le cinéma apparaît comme un objet d'étude privilégié d'un point de vue sociologique. La sociologie du cinéma s'intéresse principalement à trois éléments : 
     
      * L'étude du cinéma en tant qu'industrie culturelle et ses aspects socio-économiques (Horkheim, Adorno, Abruzze et les intellectuelles de l'Ecole de Francfort)
      * L'étude de la représentation sociale du cinéma en tant qu'institution sociale de production et de réception culturelle et artistique (Kracauer, Sorlin, Staiger, Boully)
      * L'étude du cinéma en tant qu'institution sociale de production et de réception culturelle et artistique (Morin, Javie, Esquenazi, Jullier)

        Pour Ian Charles Jarvie, ce champ d'études peut être regroupé sous quatre questions principales :
    ° Qui fait les films et pourquoi ?
    ° Qui voit les films, comment et pourquoi ?
    ° Que voit-on, comment et pourquoi ?
    ° Comment les films sont évalués et par qui ?

        Cet article analysera le rôle de la représentation offerte par le cinéma ainsi que la subjectivité de la réception des oeuvres cinématographiques par le spectateur. On tentera donc de répondre à la première, la deuxième et la dernière question.

                ° Les limites de la sociologie du cinéma
           La sociologie du cinéma a beaucoup de difficultés à objectiver sa science car beaucoup de réponses sont subjectives lors de la collecte de données. Quand on demande à quelqu'un combien de films il a vu, déjà, il n'est pas sûr du nombre et en plus, chacun ne sait pas toujours ce qui correspond exactement à un film ou non. Donc, grosse difficultés à objectiver la science donc finalement, beaucoup de subjectivité car :

       1) La capacité différentielle de mobiliser les ressources de la mémoire (fondée sur des expériences sociales très diverses de ce qu'est une évènement mémorable)
       2) La variation subjective de la définition du "film cinéma"
       3) Les diverses "attitudes de bluff" qui sont très présentes dans le déclaratif aux pratiques culturelles et qui amènent bon nombre d'enquêtes à parler, plus ou moins fréquemment, de films qu'ils n'ont pas vus

         I- Le rôle de la représentation offerte par le cinéma : représenter la réalité du monde social ou bien autre chose ?
                 Comment le sociologue peut analyser le cinéma ? Il peut l'analyser à travers les images, les signes et le langage (comme le fait la sémiologie et comme l'a fait Christian Metz, le fondateur de la sémiologie du cinéma).
                 Pour Georges Friedmann et Edgar Morin :"Tout film, même s'il traire d'art ou de la magie, est capable d'éclairer les zones d'ombre d'une société, de ses représentations et de son imaginaire (cf. Revue internationale de filmologie en 1955).
                 Dès lors, quel est le sens de la représentation cinématographique ? Représente-t-elle le réalité ou autre chose ? Cette opposition a historiquement débuté entre les Frère Lumières, partisans du cinéma "déclaque de la réalité" et Méliès, partisan des films oniriques. C'est de là que découle principalement les analyses sociologiques sur la nature des films et la projection cinématographique.

                 A) Le film comme reflet de la société : le "paradigme" de Siegfried Kracauer
                         1- Aux origines de la pensée de Siegfried Kracauer : étudier le cinéma pour comprendre les "dispositions psychologiques profondes" d'un peuple ou d'une population
                 C'est dans on ouvrage De Caligari à Hitler (1946) que la pensée du sociologue allemand débute. Faisant référence au film Le Cabinet du Docteur Caligari (1919) de Robert Wiene, Siegfried Kracauer développe l'idée que ce film est "symptomatique" des films qui ont amené Hitler au pouvoir en 1933.
                 Se rapprochant des études de Max Weber sur la musique, Kracauer analyse la production filmique du côté des réalisateurs et de leur "filtre". Le cinéma a cette particularité d'être toujours confronté entre la réalité et la fiction. Pour l'auteur allemand, même les films les moins réalistes portent des expressions et des caractères propres à une nation à une époque. Il parle de la "mentalité d'une nation".

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                         2- Qu'est-ce que la "mentalité d'une nation" ?
                 On distingue deux aspect dans cette "mentalité d'une nation" que Siegfried Kracauer voit dans la production cinématographique :

       * Un film n'est jamais un produit individuel. Un film est toujours la réalisation d'une somme de déterminants produits par toutes les personnes qui produisent le film. Cet ensemble de personnes produisants le film amène à cette "mentalité d'une nation" car ils deviennent la représentation de la société avec leurs personnalités et leurs positions sociales diverses
       * Les relations entre production filmique et réception par les spectateurs montrent que ces derniers influent sur le long terme sur la production filmique ce qui amène à réaliser la réalité d'une nation ainsi que sa "mentalité"

                         3- Comment le cinéma relève ces "dispositions psychologiques profondes" ?
                 Pour Siegfried Kracauer, c'est en analysant ce qui semble être invisible pour l'oeil su spectateur qu'on voit tous les signes et les symboles de la "mentalité d'une nation". Le sociologue allemand prend l'exemple de scènes banales comme le fait de serrer une main, le fait de marcher. Toutes ces analyses montrent que les personnages représentés à l'écran deviennent le symbole et la représentation des personnes de la vie réelle.

  
                         4- L'approfondissement de l'analyse de Siegfried Kracauer de Marc Ferro
                 Dans son ouvrage Cinéma et Histoire (1977), Marc Ferro approfondie les analyses de Siegfried Kracauer. Pour l'historien, le cinéma permet de donner un témoignage social selon trois modes :
   
       * A travers ses contenus : Les récits et les images sont représentatives de ce qui est valorisé ou non dans une société ainsi que ce qui est incohérent dans une société
       * A travers son style : Les choix techniques trahissent des choix qui sont dans le fond signifiants et que l'on peut interpréter
       * A travers sa façon d'agir sur la société : Certains films provoquent parfois des adhésions ou bien des malaises profonds. De manière générale, les films d'une société à une époque révèlent les idéologies de cette dernière
                 


                 B) Le film à la croisée des chemins entre réalité et imaginaire : la sociologie d'Edgar Morin
                         1- La démarche intellectuelle d'Edgar Morin
                 Contrairement à Siegfried Kracauer, Edgar Morin analyse le film et donc la production cinématographique en elle-même et non pas son reflet de la société. Pour le sociologue français, les films ont tous une "double nature" qui oscille entre l'imaginaire et la réalité. Pour lui, comme pour François Truffaut, c'est de la que provient le succès d'un film.

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                          2- Une approche autant sociologique qu'anthropologique
                 Edgar Morin développe cette double-approche dans deux ouvrages : Les Stars (1957) et Le Cinéma ou l'Homme imaginaire (1958). Pour lui, le cinéma dépasse les oppositions classiques (Hasard / Déterminisme ou encore Corps et Esprit).
                 Contrairement à André Bazin dans son opus Qu'est-ce que le cinéma ? (1976), Edgar Morin évoque "l'effet-cinéma" au sein duquel l'oeil cinématographique ne se substitue pas à l'oeil humain. Pour le sociologue français, le spectateur peut "corporaliser" les images pour leur donner une impression de réalité.
                En faisant une analogie avec la photographie, Edgar Morin montre que le cinéma correspond à la photographie mais à grande échelle. Le spectateur n'interprète donc pas des photographies sur petit écran mais sur grand écran, ce qui pour lui, décuple les possibilités d'interprétations.

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                          3- En quoi le cinéma est donc un fait anthropologique et sociologique ?
                 Le cinéma est prépondérant dans l'analyse sociologique et anthropologique car il est l'art qui développe le plus l'imaginaire et donc l'imaginaire social. En analysant les raisons pour lesquelles l'homme va au cinéma, Edgar Morin développe l'idée que l'homme veut voir des imaginaires sociaux (plus ou moins réels). C'est d'ailleurs en cela que les goûts cinématographiques sont si différents car les films proposent des représentations sociales très différentes car la société elle-même est composée d'individus très différents.
                 
                          4- Pourquoi le cinéma est-il "boudé" par une partie de la population ?
                 Le cinéma est parfois "boudé" pour plusieurs raisons :
       * Le cinéma épuise parfois les "charmes imaginaires"
       * Les inégalités sociales font que tout le monde ne peut aller au cinéma

                          5- L'institution cinématographique comme institution de l'imaginaire
                 Pour Edgar Morin, le cinéma est l'institution de l'imaginaire par excellence. C'est cet imaginaire qui nous permet d'étudier l'autre face du monde réel. Pour le sociologue français :"Le cinéma est la structure antagoniste et complémentaire de ce qui se dit réel, et sans laquelle, indubitablement, il n'y aurait pas de réalité pour l'homme, ou mieux, de réalité humaine."

                         6- Conclusion sur l'opposition entre Edgar Morin et Siegfried Kracauer
                 Contrairement à Kracauer pour qui le film représente la réalité historique d'une nation à une époque, Edgar Morin assimile le cinéma à une machine de l'imaginaire où nos rêves sont projetés à l'écran et où les images devraient servir à réintégrer l'imaginaire dans l'esprit de l'homme.


         II- La subjectivité de la réception d'une oeuvre cinématographique par le spectateur : une activité presque universelle et inconsciente
                 Pourquoi est-ce que chacun (même les profanes) arrive à parler de cinéma ? C'est parce qu'il réunit les qualités des trois principales "lois morales de la démocratie universelle" selon François Flahault :
     ° Première loi : la loi du tour de rôle selon laquelle chaque personne peut participer car tout le monde est allé au moins une fois au cinéma ou a une certains goûts à exposer
     ° Deuxième loi : les discussions autour du cinéma permettent facilement l'affirmation de soi sur des critères simples (critères de genre, d'esthétique) qui sont faciles à expliquer et à opposer à d'autres critères
     ° Troisième loi : Il n'y a que très peu de barrière par rapport au vocabulaire ou à la connaissance des films les plus connus. Chacun aura toujours quelque chose à dire et si quelqu'un n'aime pas le cinéma, ce serait suffisamment étonnant pour qu'on lui demande pourquoi il n'aime pas le cinéma

                 Le cinéma permet facilement de juger sur une personne sur des types de goûts, sur son capital culturel ou encore la façon dont elle s'est faite sa culture cinématographique. Peu de sujets permettent de pouvoir juger aussi "facilement" une personne sur son capital culturel et sa légitimité culturelle. C'est pour cela que les couples vont souvent au cinéma au début de leur relation, c'est pour facilement juger les goûts et les sensibilités de chacun.


                 A) Les perceptions du spectateur au cinéma
                         1- Le choix du film : l'effet de groupe
                 Le sociologie a deux choix pour analyser pourquoi un spectateur va voir tel ou tel film. Soit il fait des "profils types" de personnes en leur demandant pourquoi ils vont voir tel ou tel film, soit on analyse les choix sous la forme des contraintes des personnes en leur demandant les contraintes qui les ont poussées à aller voir tel ou tel film.
                 La contrainte la plus connue est celle du groupe. 35 à 40% des spectateurs qui vont voir un film en groupe ne se décident qu'au dernier moment à la caisse. Pourquoi ? Parce que les films sont quasiment tous aux mêmes heures et parce que les gens vont le plus souvent dans des grands complexes où les choix sont multiples. Il y a toujours une volonté de "rester ensemble" qui pousse les gens à se mettre d'accord sur un seul film à aller voir pour ne pas se diviser.
                 Comment se fait alors le choix du film quelques minutes avant qu'il débute ? Les personnes éliminent les films que certains détestent (comme le western par exemple) et finissent par choisir le film le plus "neutre". Dans le pire des cas, ils abandonnent leur décision à celle de la caissière ce qui relève des "actes d'ordre affectifs" définis dans la typologie de Max Weber :"Le comportement strictement affectif se situe à la limite, et souvent au-delà, de ce qui est orienté consciemment en fonction d'un sens. Ce peut être une réaction sans retenue à une excitation sortant du quotidien. Il s'agit d'une sublimation lorsque l'activité conditionnée par les affects se produit comme une décharge consciente des sentiments : le comportement affectif se trouve le plus souvent (mais pas toujours) déjà engagé sur la voie d'une rationalisation en valeur ou de l'acteur en finalité ou bien les deux."
                 La caissière est assimilée à la notion de trust analysée chez Adam B. Seligman. Cette notion apparue au 17ème fait référence aux personnes à qui on demande de guider nos choix lorsqu'on a pas suffisamment de connaissance sur le sujet.

                         2- Qu'appelle-t-on le "goût cinématographique" ? Comment les spectateurs jugent-ils qu'un film est bon ?
                              a) L'importance de l'idéologie du goût naturel selon Pierre Bourdieu
                 Notre goût est largement déterminé par une institution sociale que Pierre Bourdieu appelle "l'idéologie du goût naturel".
                 Pour l'auteur de la Distinction, le "soi-disant" connaisseur présente ses arguments pour se distinguer des autres par le biais de l'évidence logique et du bon sens. Elle est la conséquence de cette certitude chez certaines personnes à "détenir la légitimité culturelle et l'aisance, à laquelle on identifie l'excellence.".
                 Selon Pierre Bourdieu :"Le bon goût naturel produit ce rapport paradoxal, fait d'assurance dans l'ignorance (relative) et de désinvolture dans la familiarité que les bourgeois de vieille souche entretiennent avec la culture, sorte de bien de famille dont il se sentent héritiers légitimes. Cette idéologie naturalise les différences réelles. Elle dénote pour ceux qui la développent que la culture est n'est pas du domaine de l'acquis, de l'étudié ou du scolaire mais qu'elle est naturelle."
                 Laurent Jullier prolonge cette analyse en précisant que l'expression du goût naturel se produit avec le fait de masquer tout critère d'évaluation des oeuvres, de sorte qu'on ne puisse contredire la vérité des soi-disants détenteur de la légitimité culturelle.

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                              b) Qu'est-ce qu'un bon film pour les spectateurs ? L'analyse de Laurent Jullier
                 Malgré cette idéologie du goût naturel, l'histoire du cinéma retient que les spectateurs de toute classe sociale élaborent des manières de juger les films par rapports à leurs propres critères.
                  Apparaissant que très peu dans le cadre scolaire, l'expertise cinématographique de la quasi-totalité de la population s'élabore dans la consommation même des films de cinéma selon Laurent Jullier. Pour lui, il existe 6 critères pour évaluer un film. Les deux premiers se font dans le cadre "sauvage" alors que les deux autres sont "distingués" et les deux derniers communs à tous les spectateurs :
       
      * Son succès : Le fait d'aller voir un film dépend souvent du bouche à oreille et de la valeur a priori du film. On voit souvent ces films quand on est en groupe
      * Sa qualité technique : On essaye d'y apercevoir la justesse de la réalisation ainsi que le travail effectué par toute l'équipe technique
      * Son originalité : L'originalité n'est pas nécessairement le fait de produire une histoire totalement nouvelle mais surtout de savoir recycler des thèmes déjà abordés et de les réinventer
      * Sa cohérence : C'est ce qui permet de lier l'intégralité du film. De fait, on peut alors toujours répondre à la question :"Pourquoi cette scène ?" à chaque moment du film
      * Son édification : Un "bon film" est souvent perçu comme un film qui "fait la leçon" et qui apporte une réflexion ou quelque chose d'autre (comme la vérité du geste)
      * Son émotion : Les spectateurs sont souvent sensibles au émotions (larmes, rires, peur). Le corps du spectateur est quasiment considéré comme un instrument de mesure

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                  Ces critères sont indissociables pour comprendre la qualité d'un film selon le spectateur lambda. Le jugement de la qualité d'un film dépend de son époque. Par exemple, le cinéma de Louis de Funès était encensé à son époque mais est détesté aujourd'hui alors que les films de Jaques Tati étaient peu appréciés à son époque mais redeviennent "à la mode".

             

                 B) Les différentes cultures cinématographiques
                         1- La culture cinématographique des Français
                  La "culture cinématographique" ne doit pas être assimilée à la connaissance cinématographique car la culture est un ensemble de connaissances mais aussi de courûmes, de normes qui ne sont pas forcément de la connaissance.
                  C'est dans la grande enquête de 2000 par le département des Etudes et de la Prospective du ministère de la Culture et de la Communication qu'a été largement étudié la culture cinématographique des Français. Cette enquête s'est divisée en trois parties :

                              a) L'identification de 52 visages d'acteurs et de réalisateurs
                  Plusieurs conclusions peuvent être tirées de cette étude :
     * Les personnes possédant une licence ont reconnu deux fois plus de visage que ceux n'en ayant pas. Ainsi, le niveau scolaire semble influer sur la connaissance cinématographique
     * Bourvil et Alain Delon ont été trouvé par plus de 80% des personnes ayant plus de 18 ans ce qui démontre que le cinéma est une culture qui peut être partagée transgénérationnellement
     * James Dean a aussi été trouvé par plus de 80% des personnes ayant plus de 18 ans alors que beaucoup n'ont vu aucun de ses films ce qui montre que la culture cinématographique se transmet par le biais de représentations hors écran

                              b) La place occupée par 31 réalisateurs dans la culture cinéphile des Français
                  Plusieurs conclusions peuvent être tirées de cette étude :
     * 15% de la population connaît plus de 20 noms et 9% de personnes n'en identifient qu'un seul. C'est là que les inégalités par rapport à la connaissance cinématographique sont les plus fortes
     * Les personnes les plus diplômées reconnaissent plus de réalisateurs que les personnes disant "adorer le cinéma" ce qui montre une double culture cinéphile. D'un côté une culture développée en famille et très diversifiée et une autre faite souvent toute seule et très centrée

                              c) La fait d'avoir vu ou non 81 films sélectionnés et si oui où ? (Télévision, Cinéma, Ordinateur)
                   Plusieurs conclusions peuvent être tirées de cette étude :
      * Le nombre de films vus jusqu'à 35 ans augmente puis croit mais beaucoup plus lentement après car après 35 ans, on va beaucoup moins au cinéma même si on continue souvent à regarder des films à la télévision
      * Les personnes vivant en milieu rural ont vu en moyenne 25 films des 81 sélectionnés contre 38 pour les Parisiens. Il y a donc une inégalité dans la pratique cinématographique entre les urbains et les ruraux

                              d) Conclusion sur la culture cinématographique des Français
                   Les films exercent deux fonctions sociales :
      * Ils installent des symboles communs, transmettent des valeurs, forgent des représentations communes
      * Ils permettent l'élaboration d'une culture à la fois singulière et différenciée

                   Cette enquête nous montre les profondes inégalités face à la culture cinématographique et les processus de différentiations. Les ruraux regardent beaucoup plus souvent des films dans le cadre familial devant la télévision alors que les urbains vont plus souvent au cinéma en famille ou même seuls.

                         2- Quel est le profil sociologique du cinéphile ?
                              a) Qu'est-ce qu'un cinéphile ?
                   On distingue généralement deux définitions de la cinéphile. La première correspond au fait d'aimer tout simplement le cinéma alors que la seconde correspond au fait d'avoir des connaissances en cinéma.
                   En posant la question aux Français lors de l'enquête La Culture cinématographique des Français, on s'aperçoit que plus de la moitié des personnes considèrent qu'un cinéphile est quelqu'un qui aime le cinéma alors que seulement 27% des personnes considèrent que la cinéphile correspond au fait d'avoir de fortes connaissances cinématographiques.

                              b) Les pratiques sociologiques du cinéphile
                   Les pratiques sociales et culturelles des cinéphiles sont très particulières. Antoine de Becque parle d'une "certaine manière d'être au monde" tandis que Christian Metz parle d'une "conduite fétichiste".

                                      * Les pratiques sociales et culturelles atemporelles
                   Pour Christian Metz :"Le fétichiste du cinéma compare constamment le résultat avec les moyens mis en oeuvre car c'est dans l'écart entre les deux que se loge son plaisir."
                   Le cinéphile est aussi celui qui développe un sentiment fort pour la salle ou les salles qu'il fréquente. Ces salles sont d'ailleurs toujours les mêmes. Pour Pierre Sorlin, ces cinéphiles sont capables de décrire parfaitement leur(s) salle(s) préférée(s) et y associent un côté mystique, luxueux, confortable et moderne. Lorsque les cinéphiles rentrent dans leur(s) salle(s) préférée(s), ils ont un sentiment de somptuosité et de magnificence.

                                       * Les nouvelles pratiques sociales et culturelles du cinéphile
                  Ces nouvelles pratiques sont toutes liées au développement d'internet. Pour Laurence Allard, Internet est devenu le nouveau lieu fétichiste pour les cinéphiles. Pour elle, Internet est très lié au cinéma car les deux permettent à la fois des jugements profanes et des jugements sacrés comme ceux des "cybercinéphiles sérieux".
                  Ces nouvelles pratiques ont vu l'apparition des "ciné-webophiles" qui ont à la fois une cinéphile traditionnelle et une connaissance parfaite d'Internet. C'est néanmoins un groupe social en perdition.



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